(Le 25 juin 2024)
Chers toutes et tous,
Notre famille, n’étant pas une famille mafieuse, est composée, comme la plupart, de personnes ayant des opinions diverses, libres de penser, d’agir, de s’abstenir ou de voter comme elles l’entendent. Je sais par ailleurs que mon âge -80 ans depuis peu- ne me donne aucun droit particulier à formuler des consignes, électorales ou autres. Permettez-moi néanmoins d’exprimer une grave préoccupation, née de la situation que connaît notre pays après la dissolution de l’Assemblée nationale.
Il est possible que le 8 juillet, l’extrême-droite soit en position (si ce n’est en capacité) de gouverner la France. Pour moi qui suis né dans une capitale encore occupée par les Allemands, dont le père et le grand-père avaient dû faire chacun sa guerre et m’ont convaincu que la paix était une cause capitale, cela sonnerait le glas d’une vie consacrée à défendre les valeurs de la République - que je décline ainsi : libertés, équité, solidarité – et depuis près de 40 ans l’abolition des armes nucléaires.
Je sais bien que le RN n’est pas le parti nazi, et qu’on peut avoir des raisons de voter RN sans avoir pour autant des idées d’extrême-droite. Mais les choses ont beau être différentes, « essayer » l’extrême-droite au pouvoir, c’est ce qu’ont fait les électeurs allemands en 1933. Vous connaissez la suite.
Personnellement, le 30 juin, je ne pourrai pas voter dans la circonscription de S. pour le candidat du nouveau Front Populaire qui s’est, à ma demande instante, engagé dans le texte même de sa profession de foi à « travailler pour la paix en Europe et dans le monde en demandant l’abolition des armes nucléaires ». Mais dans la circonscription de D. où je suis inscrit, je voterai quand même pour le nouveau Front populaire.
Son programme consacre deux pages (p. 6 et 7) à « l’urgence de la Paix » : « Promouvoir une diplomatie française au service de la paix » ; « Défendre l’Ukraine et la paix sur le continent européen » ; « Agir pour un cessez-le-feu immédiat à Gaza et pour une paix juste et durable », et une page entière (p. 11) à « Lutter contre toutes les formes de racismes, contre l’antisémitisme et l’islamophobie » (ce qui fait de l’accusation d’antisémitisme une scandaleuse calomnie et une manipulation éhontée, d’ailleurs dénoncée par de nombreux juifs dans une tribune de Libération).
Il n’y a pas que ça. Le programme du nouveau Front Populaire est globalement bon. Bon pour les plus modestes d’entre nous, comme le fut le Front Popu de 1936, avec entre autres les Congés payés dont nous profitons encore, mais aussi pour presque tout le monde, excepté MM. Arnault, Bolloré, Lagardère ou Dassault, qui ne mourront pas de voir réduits leurs gigantesques profits.
Cela, c’est mon choix, pas forcément le vôtre. Votez donc pour qui vous voudrez, mais de grâce, pas pour un candidat ou une candidate d’extrême-droite.
Concernant l’éducation, une quarantaine de chefs d’établissements scolaires et d’inspecteurs de l’Education nationale ont prévenu : si l’extrême-droite gouverne, ils entreront en résistance.
« Fonctionnaires d’Etat, en conscience et en responsabilité nous n’obéirons pas.
Nous sommes des femmes et des hommes à la tête d’établissements scolaires, dans les écoles, les collèges ou les lycées de France.
Nous sommes Inspecteurs ou Inspectrices de l’Education Nationale.
Nous sommes des cadres de l’Education nationale, chargé.es de faire appliquer les orientations gouvernementales.
Nous le faisons depuis des années, parfois des dizaines d’années.
Nous le faisons avec loyauté, sérieux, impartialité et rigueur.
Nous le faisons sous des gouvernements de droite, de gauche, du centre.
Nous le faisons sous l’autorité de ministres de droite, de gauche, du centre.
Nous le faisons en fonctionnaire, en serviteur de l’Etat.
Le 8 juillet prochain, l’extrême-droite peut être au pouvoir.
Demain, peut-être, notre prochain ministre issu de ses rangs exigera des cadres que nous sommes d’appliquer des directives, de mettre en œuvre des politiques ou d’organiser un enseignement en opposition avec les valeurs républicaines qui fondent nos métiers et justifient nos engagements.
Nous ne l’accepterons pas. En conscience et en responsabilité, nous n’obéirons pas.
Parce que nous servons l’Etat, nous déclarons dès aujourd’hui qu’aucun d’entre nous n’appliquera de mesures qui contreviendraient aux valeurs de la République. Nous ne serons pas les exécuteurs d’une politique contraire aux principes qui fondent notre attachement au service public d’éducation.
Nous le disons maintenant avant qu’il ne soit trop tard, avant que notre Ecole ne soit dévoyée, instrumentalisée et serve un projet politique funeste. »
Cadres de l’Education Nationale pour la République - France
Leur pétition, que je n’ai pas signée puisque je ne suis pas et n’ai jamais été chef d’établissement (quoique fondateur de l’un d’eux), a reçu à l’heure où j’écris plus de 2000 signatures.
Ancien prof, j’approuve cette résistance. Dites-vous donc que la présente lettre est ma façon à moi, très familiale, de la rejoindre… à titre préventif.
Entendez cet appel, s’il vous plaît.
La bise à tout le monde.
Jean-Marie