D’après l’Associated Press, « après sa proposition choc d’interdire à l’Iran "de contrôler tout le processus du nucléaire civil" pour l’empêcher de se doter de l’arme nucléaire, les fabiusiens et strauss-kahniens ont tiré mercredi la sonnette d’alarme en l’accusant de contrevenir aux accords internationaux, mettant en doute sa capacité à diriger la France. »
En réalité, c’est Ségolène Royal qui a raison, et ses compétiteurs socialistes qui prouvent leur méconnaissance du dossier.
Certes, le Traité de Non Prolifération nucléaire (TNP) autorise et même encourage le développement de l’énergie nucléaire civile, dans le cas de l’Iran comme dans celui des autres pays signataires du TNP. L’Iran est donc parfaitement fondé à affirmer son droit de contrôler toutes les étapes de la production d’énergie nucléaire ; il l’est d’autant plus qu’il n’a cessé d’affirmer par ailleurs qu’il ne veut pas se procurer l’arme nucléaire (ce qu’interdit le TNP).
Mais alors, pourquoi « la communauté internationale » fait-elle toutes ces histoires autour du nucléaire iranien ? Parce qu’elle ne croit pas à la bonne foi du régime iranien et sait bien que quiconque dispose du savoir-faire et des installations permettant d’enrichir en U235 l’uranium dit « naturel » pourra s’en servir un jour pour produire de l’uranium enrichi « de qualité militaire ». Il en va de même du « retraitement » des produits de fission de l’uranium qui permet d’extraire le plutonium, autre matériau fissile utilisable pour une bombe atomique.
Donc, ou l’on croit Téhéran sur parole, et on l’autorise à contrôler toutes les étapes du processus nucléaire dit « civil », depuis l’extraction du minerai d’uranium jusqu’au « retraitement » des combustibles usés ; ou on ne le croit pas, et dans ce cas on lui en interdit effectivement la maîtrise, en amont (enrichissement) et en aval (retraitement). Car comme l’a souligné lui-même le directeur de l’AIEA, M. ElBaradei, les technologies nucléaires sont « duales » : à double usage, civil et militaire, et quiconque voudrait passer de l’un à l’autre le pourra - à l’instar de tous les pays « proliférants » dont le dernier en date, la Corée du Nord.
C’est aussi la raison pour laquelle « la communauté internationale » a ignoré la proposition faite par l’Iran, en avril 2006, d’enrichir l’uranium sur son sol, sous contrôle d’un cartel international. Il ne reste donc que deux solutions : la « solution russe » évoquée par Ségolène Royal (la Russie fournit à l’Iran l’uranium enrichi et récupère les produits de fission) ; ou la solution avancée par ACDN le 6 mai 2006 lors des 2e Rencontres Internationales de Saintes pour le Désarmement Nucléaire, en présence de la délégation de l’ambassade d’Iran, qui l’avait écartée à l’époque : l’Iran renonce globalement à l’énergie nucléaire et donne aux autres pays (dont la France) l’exemple du développement des énergies renouvelables et des économies d’énergie, avec l’aide d’une Agence spécialisée de l’ONU dont le réseau « Abolition 2000 » et M. Gorbatchev réclament la création.
Ainsi, Mme Royal, à l’inverse de MM. Fabius et Strauss-Kahn, a fait la preuve qu’elle connaissait le dossier.
Ajoutons cependant que les trois candidats socialistes à la candidature présidentielle sont pareillement illogiques lorsqu’ils réaffirment la légitimité de l’armement nucléaire de la France et de son budget de modernisation (Cf. l’essai du missile M51, hier, 9 novembre 2006), en stricte contradiction avec l’article VI du TNP qui fait obligation à la France et aux autres Etats dotés d’arsenaux nucléaires d’en négocier l’abolition.