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Dossier spécial - Réseau " Sortir du nucléaire "
Canicule : les sueurs froides du nucléaire

L’été 2006 répète l’été 2003


Publié le 31 juillet 2006

Eté 2006. Le gouvernement a accordé à EDF des dérogations pour que les centrales nucléaires puissent opérer dans les rivières des rejets d’eau chaude au-delà des limites légales. Ces rejets vont malheureusement dégrader la faune et la flore.

Mais il est important de prendre conscience qu’il ne s’agit là que d’un problème parmi les autres, souvent encore plus graves, rencontrés par le parc nucléaire face au réchauffement climatique.

Réseau " Sortir du nucléaire " - Fédération de 725 associations

Dossier spécial "Canicule et nucléaire" - Été 2006

Au menu : risques majeurs pour la santé publique, risques d’accidents nucléaires, risques de pénuries, énormes surcoûts financiers... Force est de constater que c’est le dérèglement climatique qui s’attaque au nucléaire et non l’inverse...

Sommaire :

- 1. Contrairement à ce qui nous est raconté depuis des années,
c’est le réchauffement climatique qui s’attaque au nucléaire.

- 2. EDF importe de l’électricité : la faillite du parc nucléaire français

- 3. Emissions de légionelles : risque mortel aggravé par la canicule

- 4. Danger : les 14 réacteurs de bord de mer "à flux tendu".

- 5. La centrale nucléaire du Blayais n’est PAS en "bord de mer"

- 6. Rhône et Loire : deux fleuves soumis aux rejets cumulés de plusieurs centrales nucléaires

Rappels canicule 2003 :

- 7. Crash du parc nucléaire français lors de la canicule 2003

- 8. Chronologie des infractions des centrales nucléaires - canicule 2003

- 9. Canicule : importations massives et... assurances pour EDF !


1. C’est le dérèglement climatique qui
s’attaque au nucléaire et non l’inverse.

Malgré toutes les publicités d’EDF et d’AREVA, et les beaux discours des différents gouvernants, force est de constater que c’est le dérèglement climatique qui s’attaque au nucléaire et non l’inverse.

Le réchauffement climatique n’est d’ailleurs pas uniforme et entraîne une aggravation des phénomènes extrêmes comme la tempête de 1999 au cours de laquelle la centrale nucléaire du Blayais (Gironde) a été gravement inondée, frôlant la catastrophe. Les ingénieurs du nucléaire avaient "tout calculé", l’inondation n’était pas possible, et elle a pourtant eu lieu.

Après la tempête de 1999, ce sont les canicules 2003 et 2006 qui ont mis à mal le nucléaire français. Des réacteurs ont été arrosés par EDF, d’autres sont arrêtés ou doivent fonctionner à puissance réduite, mettant la France en situation de pénurie et l’obligeant à acheter à prix d’or de l’électricité à ses voisins.

Le réchauffement climatique est en marche et les climatologues disent unanimement que, même si les mesures nécessaires étaient immédiatement prises au niveau mondial - ce qui est hélas loin d’être le cas -, le phénomène s’aggraverait encore pendant quelques décennies avant de se ralentir.

Donc, c’est inéluctable, les canicules, les sécheresses, les tempêtes... ces évènements climatiques brutaux vont être de plus en plus fréquents et intenses... et les centrales nucléaires vont être mises en grande difficulté et faire courir de graves risques de pénurie et d’accident nucléaire.

En fin de compte, contrairement à l’idée que la propagande officielle tente d’imposer, le réchauffement climatique est une raison de plus, et non des moindres, pour sortir au plus vite du nucléaire.

Au lieu de consacrer des milliards d’euros à la construction de réacteurs nucléaires inutiles (EPR et ITER), le gouvernement ferait mieux d’investir dans de véritables mesures de lutte contre les émission de gaz à effet de serre, en particulier l’isolation des bâtiments, la réduction des transports ;, et le développement des énergies renouvelables.


2. EDF importe de l’électricité : la
faillite du parc nucléaire français.

La France est le "royaume du nucléaire", le pays de l’électricité : 58 réacteurs nucléaires (record mondial), et un déferlement ininterrompu de propagande :

Le nucléaire est supposé :

- lutter contre le réchauffement climatique
- nous donner une indépendance énergétique
- nous protéger de la montée du prix de l’énergie.

C’est un échec sur toute la ligne, et le réchauffement climatique va aggraver cet échec :

- Réchauffement climatique : canicules et sécheresses se succèdent de façon ininterrompue et mettent de plus en plus souvent en échec le parc nucléaire. Au menu : pénuries, importations à prix d’or d’électricité non nucléaire, etc.

- Indépendance énergétique : déjà, 100% de l’uranium (combustible des centrales nucléaires) sont importés. Qui plus est, avec les sécheresses et canicules actuelles et à venir, la France nucléaire va se retrouver de plus en plus souvent en situation de pénurie...

- Prix de l’énergie : le nucléaire n’a pas empêché la facture énergétique française de bondir de +35% en 2005 (et déjà + 24% en 2004). De plus, la canicule contraint la "France nucléaire" à importer de l’électricité à prix d’or. Et cela ne va faire que s’aggraver dans les années à venir... Par ailleurs, la facture nucléaire va elle-même se révéler gigantesque (démantèlement, déchets, etc.)

- Black-Outs sur la "France nucléaire" : les voisins de la France (principalement Espagne et Grande-Bretagne en 2003, Italie actuellement) ne pourront nous sauver indéfiniment. La France nucléaire est condamnée à de terribles black-out qui seront de plus en plus fréquents avec le réchauffement climatique...


3. Emissions de légionelles par les tours de refroidissement.

Danger mortel autour de 11 centrales nucléaires
Le danger est aggravé par la canicule

Les tours de refroidissement des centrales nucléaires émettent des légionelles qui sont mortelles par inhalation. Qui plus est, le danger est démultiplié en période caniculaire. Devant la passivité coupable d’Edf et des autorités, le Réseau Sortir du nucléaire :

1) demande la fermeture conservatoire immédiate des centrales nucléaires de :
Belleville (Cher), Bugey (Ain), Cattenom (Moselle), Chooz (Ardennes), Civaux (Vienne), Cruas (Ardèche), Dampierre (Loiret), Golfech (Tarn-et-Garonne), Nogent (Aube), Saint-Laurent (Loir-et-Cher) et Chinon (Indre-et-Loire). La situation de l’usine Eurodif (Drôme), qui possède deux tours similaires à celle des centrales nucléaires, doit aussi être étudiée.

2) appelle les riverains de ces onze centrales, dans un rayon de 20km, à saisir le Procureur de la République pour "Mise en danger de la vie d’autrui"

En effet, le rapport ( http://www.afsse.fr/index.php?pageid=415&newsid=98&MDLCODE=news ) de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire de l’Environnement et du Travail (AFSSET) confirme les accusations portées depuis un an par le Réseau "Sortir du nucléaire" :

- EDF a triché pour cacher la vérité malgré la gravité du risque

- Les riverains sont en danger dans un rayon d’au moins 17 km

- EDF ne peut justifier, pour les tours des centrales nucléaires, le taux 5000 fois moins contraignant que celui appliqué aux autres tours.

- Contrairement aux affirmations d’EDF, les tours des centrales nucléaires sont plus dangereuses que les autres tours

Le Réseau "Sortir du nucléaire" s’étonne de ce que les experts de l’AFSSET n’aient pas tiré les conséquences de leur propre verdict ("A l’issue de l’expertise collective des documents transmis par EDF, il ressort que les éléments de démonstration d’EDF sont irrecevables") : la fermeture conservatoire et immédiate des centrales concernées s’impose : la vie d’un certain nombre de riverains est sûrement en jeu.

Le danger est aggravé par la canicule :

(*) Rapport de l’Afsset - Légionelles - Tours de
refroidissement des centrales nucléaires - Extrait :
"Pendant la canicule en 2003, EDF a observé, dans l’ensemble de ses CNPE, une augmentation notable de la concentration des Legionella dans l’eau en amont, dans le bassin froid et dans l’eau du rejet. Sur certaines CNPE, ces concentrations ont atteint 10.4 UFC/l en amont et 10.5 UFC/l en aval. En outre, ceci montre que dans certaines circonstances, il existe un impact non négligeable sur la qualité microbiologique des eaux qui sont ensuite utilisées pour la baignade ou l’irrigation."


4. Les quatorze réacteurs de bord de mer à
"flux tendu" : vers l’accident nucléaire ?

Danger maximal à Gravelines (Nord), Paluel et
Penly (Seine-Maritime), Flamanville (Manche)

EDF et le Gouvernement prévoient le fonctionnement "à flux tendu" des 14 réacteurs nucléaires situés en bord de mer : Gravelines (6 réacteurs !), Paluel (4), Penly (2), Flamanville (2).

Rappel :

"Sécheresse : les centrales nucléaires en bord de mer devront être disponibles"

AFP - Mardi 26 avril 2005 - Les centrales nucléaires d’EDF situées en bord de mer devront être disponibles en cas de sécheresse, contrairement à l’été 2003 où un certain nombre d’entre elles étaient en arrêt pour maintenance en pleine canicule.

Cette situation est problématique et porteuse de graves dangers :

- tentation pour EDF de passer outre des problèmes techniques afin de maintenir la production, pour éviter que la population découvre subitement la faillite du système nucléaire. Il y a là une véritable aggravation du risque d’accident nucléaire.

- risque d’effondrement du Réseau si une de ces centrales rencontre un problème : incident, inondation, arrivée d’algues comme c’est régulièrement le cas à Paluel, etc.

- a minima, forts risques de délestages et de coupures de courant un peu partout en France
La supposée "sécurité d’approvisionnement énergétique" assurée à la France par son nucléaire risque bien de s’évanouir au cours de l’été... en espérant que le pire n’arrivera pas dans un des réacteurs en situation de surrégime.

Note : nous dénonçons la tentation pour EDF de considérer comme "en bord de mer" les 4 réacteurs du Blayais (Gironde), situés en bord d’estuaire. En effet, cet estuaire, écologiquement très fragile, est menacé par les rejets de la centrale. (Voir fiche suivante)


5. La centrale nucléaire du Blayais
n’est PAS en "bord de mer".

Comme indiqué ci-dessus, EDF prévoit le fonctionnement "à flux tendu" des 14 réacteurs nucléaires situés en bord de mer : Gravelines (6 réacteurs !), Paluel (4), Penly (2), Flamanville (2).

En effet, même en période de sécheresse, les centrales situées "en bord de mer" sont assurées de ne pas manquer d’eau et de ne pas être contraintes à l’arrêt : contrairement aux rivières, l’océan n’est pas menacé par des rejets trop chauds.

Il se trouve que la centrale nucléaire du Blayais (Gironde), située au bord de l’estuaire de la Gironde, est elle aussi assurée de ne pas manquer d’eau. La tentation est grande pour EDF, pour tenter d’éviter le "black-out", de considérer la centrale du Blayais comme une centrale de "bord de mer", pouvant donc fonctionner "a flux tendu" tout l’été.

Or, l’estuaire de la Gironde est écologiquement très fragile et est menacé par les divers rejets de la centrale : rejets chimiques et rejets d’eau trop chaude. Hélas, la transparence n’est pas de mise chez EDF : les infractions commises pendant la canicule 2003 n’ont été connues que... 6 mois après :
Paris, le 15 juin 2004 - Blayais (Gironde) - EDF - Centrale nucléaire
Pour la période allant des mois d’août à septembre 2003, le contrôle a posteriori des thermographes immergés en Gironde a révélé des dépassements ponctuels de la température de 30°C à proximité des points de rejets. L’analyse des mesures durant cette période a montré une cinquantaine de dépassements.
(Cf. http://www.asn.gouv.fr/publications/dossiers/c160/controle_160.pdf ; page 4)

Qui plus est, la centrale fonctionnait à cette époque avec des autorisations de rejets périmées. L’association Tchernoblaye a porté plainte mais, 3 ans après le parquet de Bordeaux semble comme par hasard avoir égaré le dossier...
(Cf : http://tchernoblaye.free.fr/centrale/arretes.htm )

De toute évidence, pour sauvegarder les apparences et ne pas reconnaître l’échec du nucléaire, EDF est prête à sacrifier l’équilibre écologique de l’estuaire de la Gironde, et les autorités de l’Etat se font complices...


6. Rhône et Loire : deux fleuves
menacés par les rejets cumulés
de plusieurs centrales nucléaires

Rhône :

Sur ce fleuve, on trouve les centrales nucléaires de Bugey (Ain, 4 réacteurs), Saint-Alban (Isère, 2 réacteurs), Cruas (Ardèche, 4 réacteurs), et Tricastin (Drôme, 4 réacteurs), soit 16 réacteurs nucléaires auxquels il faut ajouter l’usine Eurodif (Tricastin).

Loire :

Sur ce fleuve, on trouve les centrales nucléaires de Belleville (Cher, 2 réacteurs), Dampierre (Loiret, 4 réacteurs), Saint-Laurent (Loir-et-Cher, 2 réacteurs), et Chinon (Indre-et-Loire, 4 réacteurs), sans oublier Civaux (Vienne, 2 réacteurs) qui opère ses rejets dans le Vienne... laquelle se jette dans la Loire. Soit 14 réacteurs nucléaires.

Analyse

Au fil du Rhône et de la Loire, les rejets chimiques, les rejets radioactifs et l’eau chaude s’accumulent, avec des conséquences inévitables pour la faune, la flore, mais aussi la santé publique (beaucoup de villes puisent leur eau potable dans les rivières). Or, aucune évaluation n’est faite de ce grave problème.

D’ailleurs, en juin 2005, le Réseau "Sortir du nucléaire" s’est procuré un édifiant document non-public : le compte rendu de la "conférence administrative" du 12 mai 2005 à Tours, à la Préfecture d’Indre-et-Loire, dans le quel on apprend que de la part d’EDF elle-même :

- "EDF tente de comprendre quelles sont les conséquences en matière de rejets entre deux centrales, notament le temps de décomposition du nitrite. Une étude est en cours sur la vallée de la Loire"

- "La Loire "canalise" beaucoup : un "bon" mélange intervient à une distance de 7 km"

Vous ne rêvez pas : plus de 20 ans après la mise en service de ses centrales, EDF en est encore à "tenter de comprendre" ce qui se passe. Par ailleurs, si vous vous baignez plusieurs kilomètres en aval d’une centrale nucléaire, vous risquez fort de vous retrouver sans le savoir dans un gros paquet de produits chimiques non dilués...

Mais, comme d’habitude dans le nucléaire, ce sont les exploitants (EDF, Areva, CEA) qui font les mesures et affirment qu’il n’y a aucun problème.


7. Bilan de la canicule 2003 : la
faillite de la "France nucléaire"

La canicule de l’été 2003 a démontré la faillite du système nucléaire : non seulement les 58 réacteurs français n’empêchent pas le réchauffement climatique, mais c’est au contraire ce dernier qui s’attaque aux centrales nucléaires :

- EDF a tenté une curieuse et inquiétante expérience d’arrosage de réacteur nucléaire à la centrale de Fessenheim (Alsace)
(Rappel : http://www.canarochouf.com/tgjb/news/?p=28 )

- Des réacteurs nucléaires ont dû fonctionner à bas régime ou même être arrêtés. La France, supposé "royaume de l’électricité", n’a évité la pénurie qu’avec des importations massives d’électricité alors que le prix du kWh montait en flèche.
(Cf Les échos - 1er octobre 2003 : "La canicule a coûté 300 millions d’euros à EDF. (...) Ce sont essentiellement l’Espagne et dans une moindre mesure l’Angleterre qui sont venues à l’aide de l’électricien tricolore")

- Les règles de protection de l’environnement et de la santé des populations ont été bafouées impunément. Ces graves infractions ont été "couvertes" par un arrêté interministériel à partir du 12 août 2003.

www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf ?numjo=INDX0302125A

Alors qu’EDF a reconnu "royalement" trois infractions, le Réseau "Sortir du nucléaire" a pu en dénombrer une trentaine. Par la suite, la centrale nucléaire du Blayais a reconnu (en 2004, avec 10 mois de retard), avoir opéré cinquante infractions pendant la canicule 2003.

- Aucun organisme indépendant n’a pu étudier les conséquences des dérogations accordées durant la canicule 2003. Le "comité de suivi" mis en place par le gouvernement ne comportait que des organismes étatiques ou fortement subventionnés. Il ne s’est d’ailleurs intéressé