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Il y a 20 ans : Tchernobyl


Publié le 3 avril 2006

Le matin du 26 avril 1986, à 1 h 23 min et 48 s, heure locale, une explosion se produit dans le réacteur de l’unité n° 4 de la centrale nucléaire de Tchernobyl, dans la République Socialiste Soviétique d’Ukraine. La vérité sur cette catastrophe nucléaire civile sans précdent, du moins quant à l’ampleur, mettra plus de temps à franhir les frontières que les nuages de poussières radioactives qui vont asperger l’Europe pendant des mois et des années.

En février 1989, Les Nouvelles de Moscou (Moskoskie Novosti), profitant de la "glasnost’" (publicité des informations) instaurée par les initiatives de Mikhaïl Gorbatchev, écrivent : "Trois ans après la catastrophe, le bilan s’alourdit".

C’est cet article, et un second publié en juin 1989, qu’on trouvera reproduits ci-dessous.

Après la catastrophe, le silence est retombé sur Tchernobyl. « Les Nouvelles de Moscou » ont mené l’enquête et mesuré la gravité des
séquelles : maladies, monstruosités, mutations génétiques contredisent l’optimisme officiel.


"Les Nouvelles de Moscou" n°8, 19 février 1989 :

- Les séquelles -

La campagne ukrainienne subit encore les conséquences de l’accident de Tchernobyl.

Fin avril 1986, chercheurs, ingénieurs et administrateurs arrivés à Tchemobyl et à Pripiat ne disposaient pas encore d’informations suffisantes sur l’accident. On voyait encore un halo rouge et de la fumée au dessus du réacteur détruit. Les cartes radiométriques de la région contaminée n’avaient pas encore été établies, mais les spécialistes menaient déjà des discussions interminables et tentaient d’évaluer la situation. Dans ce remue-ménage, j’ai entendu des choses qui n’étaient pas destinées à mes oreilles de journaliste.

Ensuite, l’information fut de plus en plus passée au crible. J’ai pourtant appris beaucoup de choses dont certaines ne me sont devenues claires que ces derniers temps. Par exemple, sur l’exactitude de certaines évaluations faites au début.

Les « purs » et les « impurs »

Le district de Naroditchi de la région de Jitomir ne faisait pas partie de la zone d’évacuation : ses villages les plus proches sont situés à 50 km de la centrale de Tchernobyl et les plus éloignés à 90 km. Mais, le 26 avril 1986, il soufflait un vent d’est qui apporta un nuage radioactif. A l’heure actuelle, dans ce district, il y a des endroits où la radiation enregistrée à la surface du sol dépasse 80 curies au kilomètre carré.

L’automne dernier, après avoir vérifié, à l’aide d’un dosimètre, l’enclos de la kolkhozienne Pavlina Stroutskaia, je n’y ai pas trouvé un coin où le niveau de radiation gamma fût inférieur à 0,2 mR/h. Devant la porte où la maîtresse de maison était en train de discuter avec ses voisines, elle était supérieure à 2 mR/h. Rappelons, pour avoir un point de repère, que le fond naturel de radiation à Kiev est de 0,014 mR/h.

Néanmoins, Anatoli Melnik, premier secrétaire du Comité du Parti du district de Naroditchi, obligé de devenir spécialiste de « radiologie appliquée », estime que le danger principal actuellement n’est pas la radiation, mais la contamination de l’organisme par des radionucléides contenus dans des denrées alimentaires. On continue d’amener dans les villages les plus contaminés les produits laitiers et de boucherie d’autres régions, et chaque habitant bénéficie d’une dotation d’un rouble par jour pour en acheter. Cependant, ce n’est qu’une solution partielle, car les produits purs sont manifestement en quantité insuffisante. Malgré les mises en garde des médecins, beaucoup boivent le lait de vaches locales et continuent de récolter les légumes et les fruits cultivés sur leurs lopins de terre. « C’est un bureaucrate, dont le bureau se trouve loin de ces terres, qui a dû inventer la division des villages en purs et impurs », m’a dit, avec amertume, le secrétaire du Comité de district du Parti. La poussière radioactive est balayée d’un lieu vers un autre par le vent, charriée par les cours d’eau après la pluie, répandue par le bétail et les moyens de transports.

Leonid Iline, vice président de l’Académie de médecine de l’URSS, a plusieurs fois déclaré, après l’accident de Tchernobyl, que les doses relativement petites d’irradiation sont absolument anodines. Mais, avant l’accident, on a vu paraître sous sa rédaction un ouvrage où l’on peut lire : « Même les doses relativement petites d’irradiation perturbent le fonctionnement des réflexes conditionnés, modifient l’activité bioélectrique de l’écorce cérébrale et provoquent des altérations biochimiques et métaboliques au niveau moléculaire et cellulaire. » L’optimisme actuel de l’académicien ne persuade pas tout le monde.

Un troupeau anormal

A la ferme du kolkhoze Petrovski, on m’a montré un porcelet dont la tête ressemblait à celle d’une grenouille. A la place des yeux, il avait des excroissances tissulaires où l’on ne distinguait ni cornée ni pupille.
« C’est un de nos nombreux monstres », m’a expliqué Piotr Koudine, vétérinaire du kolkhoze. « Ordinairement, ils meurent sitôt venus au monde, mais celui là vit encore. »

La ferme est petite, 350 vaches et 87 porcs. En cinq ans, avant l’accident nucléaire, on n’y a enregistré que trois cas de monstruosité parmi les porcelets et pas un parmi les veaux. En un an, après l’accident, il y a eu
64 monstres : 37 porcelets et 27 veaux. Dans les neuf premiers mois de 1988, 41 porcelets et 35 veaux. Ces derniers naissent le plus souvent sans tête ni extrémités, sans yeux ou sans côtes. Les porcelets sont exophtalmiques, ont le crâne déformé, etc.

Et que disent les savants ? A Kiev, on a créé un institut spécial de radiologie agricole. « Ils n’ont pas manifesté un intérêt particulier pour notre ferme », m’a répondu Piotr Koudine. « Ils ont examiné plusieurs cadavres de nouveau nés monstrueux et déclaré que ce phénomène pouvait être provoqué par des centaines de causes n’ayant rien à voir avec la radiation. Je suis vétérinaire, donc je le sais moi aussi, mais les statistiques de la monstruosité m’obligent à distinguer une cause bien déterminée. Car les fourrages sont produits par des champs contaminés par les radionucléides. Et puis, les responsables du stockage refusent notre bétail car les doses de radiations qu’il a reçues sont supérieures à la norme.

Etat de droit ?

La porchère ayant sorti le porcelet monstrueux pour que je puisse le photographier m’a dit, les larmes aux yeux « Ma fille vient de se marier. Comment sera mon petit fils ? » Je n’ai pas su comment la rassurer.

L’ouvrage cité plus haut (paru avant l’accident) contient les données obtenues par les radiologues réputés A. Gouskova, A. Moïsseev et L. Sokolina. La dose cumulée de 4,4 microcuries de césium 137 ou 0,4 microcurie de strontium 90 peut provoquer des changements considérables dans l’organisme humain. Une telle irradiation nécessite un traitement.

Voici les statistiques des services médicaux du district de Naroditchi : 35 % de sa population a reçu une dose de 1 à 2 microcuries de césium 137, plus de 4 % une dose de 3 à 5 microcuries, et près de 4 % une dose de 5 à 10 microcuries. Plus de la moitié des enfants dans ce district souffrent d’affection de la glande thyroïde, dont beaucoup au deuxième ou troisième degré.

Les responsables de la santé publique de la République affirment qu’au delà de 30 km autour de la centrale nucléaire, il n’y a aucun danger pour la santé des hommes, mais ils ne donnent aucune information à ceux qui viennent à Kiev pour se faire examiner. Les femmes s’inquiètent. S’il n’y a pas de danger, pourquoi nous déconseille-t-on d’avoir des enfants ?

« Nos médecins », m’a déclaré Anatoli Melnik, « notent l’aggravation de maladies chroniques parmi la population, ainsi que la convalescence difficile des personnes ayant subi des interventions chirurgicales. On a vu doubler la moyenne annuelle de maladies cancéreuses et notamment le nombre de cancers de la lèvre et de la cavité buccale. »

Les conditions dans lesquelles nous habitons sont elles normales ou non ? Si elles sont normales, il faut des mesures de grande envergure, car ce qui se fait est insuffisant. Il faut asphalter toutes les routes et toutes les aires utilisées pour les travaux agricoles. Pour le moment, on n’a pas même fait un quart de ce travail. On installe trop lentement le réseau de gaz dans les localités dont la population se sert encore principalement de poêles à bois. On s’est contenté de recommander à la population de laver les bûches avant de les utiliser et de ne pas utiliser leurs cendres comme engrais. Et il existe une multitude d’autres problèmes que le district est incapable de résoudre lui-même. Pourquoi, par exemple, les paysans ayant subi des pertes énormes par la faute des énergéticiens sont ils obligés de dépenser leur argent pour acheter des tracteurs à cabines hermétiques ? De telles cabines coûtent 1 400 roubles et il en faut des centaines.

Les autorités locales ne peuvent pas légitimer un congé prolongé pour les habitants du district, bien que la pratique prouve qu’un mois et demi ou deux mois passés en dehors de la région contaminée permettent d’éliminer très efficacement de l’organisme le césium 137.

On parle beaucoup de l’Etat de droit qu’on est censé édifier, mais pourquoi les habitants du district de Naroditchi sont-ils voués au rôle humiliant de quémandeurs alors qu’ils devraient avoir le droit d’exiger une compensation complète de leurs pertes de la part des administrations qui en sont responsables ? Sans parler de leur droit d’avoir une information exhaustive sur la santé de la population et sur l’état des terres.

Vladimir Kolinko

Lorsque cet article était en voie de préparation, à Moscou a eu lieu une projection d’un documentaire de 20 minutes "Micro !" tourné par Guéorgui Chkliarevski, réalisateur de Kiev. L’équipe a travaillé dans le district de Naroditchi de la région de Jitomir, celui-là même dont parle Vladimir Kolinko. Tout ce qu’il rapporte et bien d’autres choses encore ont été filmés en septembre-novembre 1988.

Ce documentaire fort impressionnant s’est heurté à des difficultés du fait de la censure car, selon les dispositions en vigueur, toute oeuvre sur Tchernobyl doit être examinée par une commission d’experts sous l’égide du Comité d’Etat de l’URSS pour l’utilisation de l’énergie atomique composée de représentants de différents ministères et comités d’Etat. Le ministère de la Santé publique a émis une condition : supprimer dans le film l’interview des médecins. Le Comité d’Etat pour la météorologie a demandé de couper les séquences où figurait un dosimétriste travaillant sur le terrain. "Cela ne se répercutera pas sur la valeur artistique de votre film". C’est de cette manière qu’on a essayé de calmer les auteurs du film.

La projection du film a été pourtant autorisée, fin janvier. Le documentaire "Micro !" fera sûrement beaucoup réfléchir de nouveau aux conséquences de l’accident de Tchernobyl.


L’article de Vladimir Kolinko fit l’effet d’une bombe dans l’opinion publique. La réponse des scientifiques officiels ne se fit pas attendre.
Au menu : réfutations spécieuses et chiffres alibis...



"Les Nouvelles de Moscou" n°26, du 23 au 29 juin 1989 :

- Au-delà du réel -

Malgré les dénégations des scientifiques « autorisés », des voix s’élèvent de toutes parts pour corroborer les propos des « Nouvelles de Moscou ».
Images à l’appui, le constat est terrible dans la région de Tchernobyl, la réalité dépasse toutes les fictions possibles et la mort fait lentement son travail.

La prise de position des spécialistes est traditionnelle : la vérité est accessible seulement aux professionnels, tout le reste n’est que de l’amateurisme nuisible et dangereux.

Disons, pour commencer, que la rédaction a appris l’existence de la lettre des trois savants par Vladimir Marine, premier vice-président du Bureau pour le complexe combustible-énergie auprès du Conseil des ministres de l’URSS. Et cela permet parfaitement de supposer le caractère commandé de la lettre, si l’on sait de plus que c’est le dirigeant de l’administration, et non les auteurs, qui s’est par la suite plusieurs fois informé de la date de la publication de l’article.

Dans la réponse des savants, il est dit que les spécialistes venus en inspection dans le district n’ont pas découvert de documents confirmant la croissance du nombre de monstruosité à la naissance chez les veaux et les porcelets. Les chiffres enregistrés en 1988 seraient même inférieurs à la moyenne du pays. Pourquoi cette méfiance à l’égard des spécialistes locaux, pourquoi faut-il considérer que ceux qui sont venus d’ailleurs sont meilleurs ? A ce propos, la rédaction a reçu un témoignage écrit avec des chiffres concernant une exploitation où des monstruosités sont observées chez un tiers du jeune bétail déjà.

« Vivons nous dans des conditions normales ou anormales ? » C’est la question du premier secrétaire du Comité du Parti du district de Naroditchi, Anatoli Melnik. Les trois savants lui répondent qu’il n’y a pas de raisons objectives d’être inquiet pour la santé des gens. Mais, alors que leur lettre était en instance de publication, on a appris qu’il avait été décidé d’évacuer trois villages de plus dans le district de Naroditchi, et que cette mesure était à l’étude en ce qui concerne plusieurs autres villages. Il s’agit d’évacuer quelque trois milliers de personnes. Parce qu’il n’existe aucun danger ?

Stress radioactif

Une lettre signée par cent trente-cinq habitants des villages du district de Naroditchi fait état d’une augmentation constante des troubles de santé chez les jeunes enfants.

Ce ne sont pas les « publications inconsidérées » qui provoquent les stress, mais le mutisme de l’administration. Que penser de bon quand on est sans cesse convoqué pour des examens médicaux mais sans jamais pouvoir en obtenir les résultats ni la dose de radioactivité accumulée ?

Le discrédit de l’énergie atomique et des administrations qui la servent ne peut être évité que si les rapports entre les « spécialistes » et les « profanes » changent radicalement. Il est difficile d’y parvenir, après tant d’années de secret total, au sujet de Tchemobyl. Car, comme on dit, telle voix, tel écho. Mais il est nécessaire d’aboutir à la vérité, à la compréhension.

« En attendant », considère Grigori Revenko, premier secrétaire du Comité régional du Parti de Kiev, « il faut procéder régulièrement à l’expertise de la situation radiologique, dans un climat de glasnost et avec la participation de l’opinion publique, et il faut publier systématiquement dans la presse les chiffres sur l’évolution des maladies et leurs causes.
Il faut aussi, à mon avis, une loi au regard de laquelle les dirigeants coupables de cacher l’information authentique sur l’environnement et les niveaux de radioactivité dans telle ou telle région devront répondre. »

Un groupe de députés, composé d’Alla Yarochinskaïa, journaliste de la région de Jitomir, Mikhaïl Delikov, premier secrétaire de la direction de l’Union des cinéastes d’Ukraine, et l’écrivain Youri Chtcherbak, a prié notre rédaction d’organiser une table ronde avec les auteurs de ladite lettre. Ils ont proposé de profiter de l’occasion pour commenter un nouveau film vidéo, « Au delà des limites », évoquant les séquelles de la tragédie de Tchernobyl, tourné il y a quelques jours dans le district de Naroditchi, et d’entendre des spécialistes aux points de vue différents.

Immunodéficience

Constantin Gordeev, vice directeur de l’Institut de biophysique du ministère de la Santé publique de l’URSS, l’un des auteurs de la lettre publiée par les « Nouvelles de Moscou », à qui nous avons annoncé cette table ronde, en a accepté l’idée, à condition de recevoir une directive spéciale du premier vice ministre de la Santé publique ou le texte officiel de l’interpellation des députés. Guennadi Sergueïev, premier vice ministre, a promis sa contribution, et le directeur de l’Institut, l’académicien Leonid Iline, ne s’y est pas opposé non plus. Mais le professeur Gordeev a alors prétexté des occupations et proposé de « se rencontrer une autre fois, dans les murs de l’établissement ».

La projection du film « Au delà des limites », réalisé par Semione Sloutchevski, s’est déroulée en l’absence des opposants du ministre de la Santé. Le lendemain, la députée Alla Yarochinskaïa a fait parvenir la cassette à la présidence du Congrès et prié ses collègues d’en prendre connaissance.

Que nous montre donc ce film ? Les médecins du district de Naroditchi disent que, dans les premiers jours, les plus dangereux, qui ont suivis la catastrophe, on a omis de procéder aux soins à base d’iode, en l’absence de renseignements véridiques sur la situation. Cela a eu pour résultat les doses considérables de rayonnement reçues par la glande thyroïde, surtout chez les enfants : jusqu’à 500 rads et plus. On relève des mutations du système immunitaire. Les cas de cataracte chez les enfants et les jeunes sont devenus beaucoup plus fréquents. Une femme médecin déclare en pleurant : « Des petits de trois ou quatre ans hurlent de douleur et nous ne savons pas pourquoi, nous ne pouvons pas les aider. Les spécialistes venus de Kiev disent que cela n’est pas étonnant, du fait de l’immunodéficience. Nous sommes impuissants, et le service régional de la Santé n’a pas de spécialistes à nous envoyer dans notre district. »

Les enseignants et les parents d’élèves sont unanimes. Il ne faut pas reprendre l’école l’année prochaine, et l’on devrait évacuer les enfants de cette zone. Or, trois cent trente sept familles des douze villages les plus contaminés ont des enfants. Comment y resteraient ils puisqu’on ne peut pas manger les légumes du potager, ni boire le lait des vaches, ni aller en forêt, ni se baigner dans la rivière ? De plus, un poste de décontamination pour véhicules se trouve à cinquante mètres de l’école et une scierie fait des planches à partir des arbres contaminés.

« Les gens ont vécu dans ces conditions durant trois ans », témoigne le secrétaire du Comité de district du Parti, « et, maintenant, on leur dit, pour les calmer : "d’ici trois ou quatre ans, vous serez relogés". C’est incroyable ! Et que deviendront les quelque dix mille retraités qui resteront ici ? Il faut prévoir des facilités à leur égard, des majorations des retraites pour leur permettre d’acheter des produits non contaminés amenés d’ailleurs.

Et les habitants des villages de Naroditchi répètent devant la caméra « Tout le monde veut oublier Tchernobyl. Nous sommes des laissés pour compte. »

Visions de cauchemar

Sur l’écran défilent des images. Un poulain né avec huit pattes http://www.dissident-media.org/infonucleaire/poulain_kostine.jpg des porcelets dont les têtes sont pareilles à celles de grenouilles, qui ont du mal à se déplacer. Le professeur Gordeev affirme que la radiation n’y est pour rien. Est ce si sûr ? Dimitri Grodzinski, chef du secteur de biophysique et de radiobiologie de l’Institut de botanique de l’Académie des sciences d’Ukraine, écrit de Kiev « Nous avons commencé des recherches dès le lendemain de l’explosion, dès les premiers jours de mai 1986.

Depuis, un tableau impressionnant de modifications dans l’environnement s’est déployé devant nos yeux. En 1987, on a vu des feuilles géantes de chêne, de tilleul, d’acacia blanc et de marronnier. Ces feuilles d’une dimension jamais atteinte avaient une forme dénaturée, et prenaient parfois des contours si capricieux qu’on ne pouvait plus déterminer l’espèce à laquelle elles appartenaient.

Les chercheurs qui ont écrit aux « Nouvelles de Moscou » s’élèvent contre la thèse selon laquelle les monstruosités des animaux du district de Naroditchi seraient imputables à la radioactivité. Les doses auraient été insignifiantes. Mais ils ont compté probablement sans l’anomalie nucléique surgie après l’accident de Tchernobyl. Sans entrer dans les détails, disons que les cellules de l’organisme vivant subissent une influence complexe. A part la radiation gamma extérieure, elles se ressentent aussi des radiations bêta et alpha, ainsi que des champs de radiation différentiels des particules dites chaudes. De ce fait, on se doit d’être extrêmement attentifs et de repousser la thèse séduisante selon laquelle « les petites doses » sont inoffensives pour les être vivants, et notamment pour l’homme.

Mais que dire sur la notion de dose de radiations admissible ? Cette norme est actuellement établie en URSS à 35 rems en soixante dix ans de vie http://www.dissident-media.org/infonucleaire/non_evacuation.html alors qu’elle varie de 5 à 10 rems en cinquante ans pour les autres Etats industrialisés. Le chercheur Vladimir Gueorguievski relate que, lors des discussions de la situation dans le district de Naroditchi qui ont eu lieu à l’Institut des recherches nucléaires de l’Académie des sciences d’Ukraine, on a avancé que les médecins avaient incorrectement interprété les mesures de la radioactivité et avaient sensiblement sous estimé les doses réelles auxquelles les organismes humains avaient été soumis. En d’autres termes, la situation serait plus grave qu’on ne le pensait au début. Beaucoup de spécialistes en étaient déjà avertis.

Mikhaïl Belikov, député du peuple, et Vladimir Tchernooussenko, maître de recherches à l’Institut de la physique théorique de l’Académie des sciences d’Ukraine, ont évoqué, lors de la projection du film, le danger de nouvelles restrictions imposées à l’information, si les centrales électronucléaires étaient, comme prévu, confiées à la compétence du ministère des Constructions mécaniques. Alors tout le cycle du nucléaire, depuis l’extraction du minerai jusqu’à l’ensevelissement du combustible utilisé, serait concentré dans le pouvoir d’un seul ministèreabsolument opposé à tout contrôle de l’opinion (il suffit de dire que même pour examiner le respect de la légalité dans ce secteur, il y a un parquet spécialisé et les cas des personnels pris en faute sont examinés par le tribunal à huis clos).

Oui, ce ministère a des spécialistes hautement qualifiés, une discipline très rigoureuse, mais on ne peut pas admettre qu’aujourd’hui, alors que nous en avons appris long sur Tchernobyl, on redise aux gens : « Cela n’est pas devotre compétence. » C’est pourquoi les députés parlent au Congrès, au nom de leurs électeurs, des causes qui ont engendré le phénomène de Tchernobyl.

Andreï Prainikov

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